Page:Segur - Pauvre Blaise.djvu/241

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Blaise. C’est toi qui nous guideras, comme tu as fait tout à l’heure pour tes habits. »

Le comte avait fini son déjeuner ; il sonna et fit emporter le plateau. Le domestique vit avec surprise que Blaise n’avait pas mangé.

« Voyez donc, mes amis, dit-il en rentrant à l’office : une nouvelle merveille ! M. Blaise a refusé l’invitation de M. le comte, il n’a pas déjeuné ; voici son couvert, et le verre, et le pain qui n’ont pas été touchés ?

— Qu’est-ce qu’il y a donc ? Ce garçon de concierge, ce mangeur de pain et de fromage, refuse de la volaille, du vin, des gâteaux ! On ne pourra donc pas le prendre par la bouche. Je me souviens bien qu’il m’a refusé il y a quelque temps un verre de bon vin de Frontignan et des biscuits. Il n’avait jamais rien pris d’aussi bon, bien sûr. Et à propos de ce vin, comment s’en est-il tiré avec M. le comte ? nous ne l’avons jamais su.

— Mais c’est à partir de ce jour qu’il a été si bien avec M. le comte, qu’on lui a permis d’aider à soigner M. Jules, et qu’il s’est introduit dans le château pour n’en plus sortir.

— Ah ! oui, un garçon comme cela, quand il s’est implanté près d’un homme riche et grand seigneur comme M. le comte, c’est fini ; ça n’en bouge plus… Est-ce croyable ? M. le comte qui l’embrasse, qui l’invite à déjeuner !