j’irai passer probablement le mois de décembre avec toi à Livet (jusqu’au 22 ou 23), après avoir passé le mois de novembre chez Henriette. Si le bon Dieu te demande le terrible sacrifice du petit Paul, j’irai te rejoindre de suite. Dis-moi bien exactement son état tous les jours, à moins que le mieux ne se soutienne ; alors je ne te demanderai pas une si grande exactitude. Ta lettre, arrivée hier soir, m’a consternée et attristée. Quelle année tu auras passée, ma pauvre petite ! Je t’embrasse bien tendrement avec Émile et les chers enfans.
Chère petite, je suis triste et inquiète ; j’espérais une lettre hier, puis aujourd’hui ; je n’en ai pas ; et malgré ma grande confiance en Notre-Dame de la Salette, je crains une aggravation dans l’état de mon cher petit Paul. Les vues du bon Dieu sont si différentes des nôtres ! Ce que nous lui demandons comme un bienfait peut, dans notre ignorance et notre aveuglement, être la source de chagrins et de malheurs bien plus que ceux qui nous effrayent et dont nous lui demandons d’être délivrés. Si nos enfans doivent en grandissant devenir des serviteurs infidèles, et qu’il les appelle à Lui dans l’âge de l’innocence, c’est encore un effet de sa miséricorde et de son amour. Et pourtant, c’est un chagrin cruel, un grand malheur, d’après les lois naturelles, et c’est pourquoi