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MADAME BONBECK.

Je passerai, parbleu ! Tant pis pour ceux qui se trouveront sur mon chemin. »

Et, enjambant sur le monsieur qui défendait le passage, elle allait se jeter sur une dame placée devant, lorsque le monsieur tira si fortement ses jupes, que sa jambe resta en l’air ; un autre monsieur saisit cette jambe pour prêter main-forte à son voisin ; Mme Bonbeck se mit à jurer comme un templier, à vouloir se faire jour à coups de coude et à coups de genou : le public impatienté cria : « À la porte. » On s’attendait à une bataille en règle, lorsque, à la stupéfaction générale, Mme Bonbeck resta immobile, la jambe dans les mains du monsieur, les bras sur les épaules, d’une dame et d’une demoiselle, la bouche ouverte, les yeux effarés ; elle venait, d’apercevoir Simplicie, Prudence et Coz.

« Simplette ! cria-t-elle ; Prude ! Coz ! Comment diable êtes-vous ici ? »

Et, redevenant douce comme un agneau, elle fit des excuses à droite, à gauche, devant, derrière, se retira au dernier rang avec Boginski qui suait à grosses gouttes, et continua à appeler de sa voix la plus douce Simplette, Prude et Coz.

Simplicie, terrifiée, supplia Prudence de l’emmener ; Prudence, plus effrayée encore que sa jeune maîtresse, ne pouvait faire un mouvement ni prononcer une parole. Coz regardait Mme Bonbeck