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voulu faire à ta tête, et voilà. C’est bien, tout de même, ce que tu dis là. Nous arrangerons cela ; j’écrirai à mon frère Gargilier ; nous te tirerons de ta pension, sois tranquille. Et toi, Simplette, pourquoi fais-tu la moue ?

SIMPLICIE.

Je ne sais pas, ma tante.

MADAME BONBECK.

Diable de sotte ! On n’a jamais vu une fille plus impatientante. « Je ne sais pas, ma tante. » Pourquoi ne dis-tu pas comme ton frère ? À la bonne heure, celui-là, il parle et parle bien. Tiens, j’ai une furieuse démangeaison de te donner une paire de claques. Va-t’en. Vrai je ne réponds pas de moi ; la main me démange. »

Simplicie ne se le fit pas dire deux fois ; elle s’empressa de se soustraire aux envies fâcheuses de sa tante et courut se jeter sur une chaise dans sa chambre ; elle réfléchit tristement à la vie qu’elle menait à Paris ; pas un plaisir, pas même de repos, et beaucoup de contrariétés, de peines et d’ennuis. Elle commença à reconnaître le vide que lui laissait l’absence de ses parents, de leur protection, de leur tendresse ; leur dévouement lui apparut sous son vrai jour ; elle se trouva ingrate et méchante ; elle sentit combien elle les avait blessés, chagrinés ; elle pensa avec effroi au temps considérable qui lui restait encore à vivre loin d’eux et près d’une tante