Page:Segur - Les Deux Nigauds.djvu/225

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

homme à mine étrange, s’élança dans le cercle au milieu duquel se tenaient le sergent, la loueuse de chaises et les enfants. Elle poussa la loueuse de chaises, fit trébucher le sergent, et saisit les enfants dans ses bras.

« Mes pauvres enfants, mes pauvres jeunes maîtres, faut-il que j’aie eu ce malheur ! Vous perdre, et apprendre eu vous cherchant que vous étiez accusés de vol par une méchante créature qui…

— Qu’est-ce à dire, méchante créature ? interrompit la loueuse avec colère. Créature vous-même, et mauvaise créature, encore !…

— J’ai retrouvé mes enfants, je me moque de vos injures, vieille rien du tout, répondit Prudence avec majesté.

— Ah ! vraiment ! Moi, une rien du tout ! Venez-y voir donc, perdeuse d’enfants, coureuse de promenades !

— Silence, mesdames. Pas d’injures ! Du calme, de la modération, dit le sergent.

— Mes pauvres enfants ! mes pauvres jeunes maîtres ! pardonnez-moi ma distraction ; je ne sais où j’avais la tête d’avoir pu vous perdre de vue une seule minute ! Je n’ai pas cessé de courir et de vous appeler depuis que je vous ai perdus ! »

Prudence les embrassait, leur baisait les mains ; elle ne songeait plus à la loueuse de chaises, ni à ses injures ; elle questionnait les enfants, écoutait leurs