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crotte. Monsieur et madame pensent que ce n’est pas de bonnes manières. En diligence, un vaurien de chien a dévoré le beau morceau de veau rôti que j’avais préparé pour mes jeunes maîtres ; heureusement qu’un brave Polonais a jeté par la fenêtre le chien et la dame avec. Les Polonais sont de braves gens ; ils ont tué beaucoup de Russes, parce qu’ils avaient les jambes dévorées de vermine ; ils ont tout de même été très bons ; ils nous ont menés dans une maison très laide, toute noire, où nous n’avons pas dormi par rapport aux punaises qui nous ont mis la figure et les bras comme des boisseaux. La sœur de Monsieur n’est pas très méchante ; seulement qu’elle crie beaucoup, à preuve que mamzelle en a peur tout à fait. M. Innocent est entré à la maison des savants après que les bons soldats nous ont nettoyés et débarbouillés ; la robe de mamzelle est perdue de boue et d’eau. Le Polonais roux nous a suivis, mais il s’est tout de même sauvé ; ce n’était pas gentil. Il nous a ramenés en voiture ; elles ne sont pas belles : si monsieur voyait les chevaux et le cocher, il rirait, bien sûr ; c’est maigre, c’est sale ; ça ne ressemble pas à la belle carriole bleue de monsieur, ni à son char à bancs rouge et vert. Mamzelle a bien ri à dîner, parce que Madame était en colère, comme toujours, ce qui a bien fait plaisir à madame et ce qui a fait bien pleurer mamzelle en se couchant, qui regrette