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— Ou bien des gens qui se battaient au cabaret.

— Les petits ont l’air de scélérats.

— La femme a l’air féroce tout à fait.

— C’est du sang qu’ils ont sur leurs habits et leurs visages.

— Peut-être bien que oui ; ils ont sans doute assassiné quelqu’un.

— Le garçon a-t-il l’air bête !

— Et la fille, est-elle grasse et laide !

— Et quels oripeaux elle a sur elle !

— L’homme a un air tout drôle ; on dirait que c’est lui qui a été assassiné.

— Imbécile ! comment veux-tu qu’il soit assassiné, puisqu’il se porte bien et qu’il marche aussi ferme que toi et moi !

— Il est pâle tout de même.

— C’est qu’il a peur. »

Entrés au corps de garde, le Polonais et ses malheureux compagnons furent entourés par les soldats. Quand ils surent que loin d’être des malfaiteurs, c’étaient des victimes d’une gaieté populaire, ils s’empressèrent de leur venir en aide ; ils leur apportèrent de l’eau pour enlever la boue qui couvrait leurs visages et leurs vêtements. Simplicie pleurait, Innocent tremblait de tous ses membres, Prudence grommelait contre Paris et ses habitants ; le Polonais pompait de l’eau, tordait leurs mouchoirs et leurs jupes, allait de l’un à l’autre, et parlait d’Os-