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Le père Thomas.

Tu arrives trop tard, lambin, nous avons fini ; il n’y a plus rien pour toi.

Gaspard ne répondit pas ; il allait sortir, lorsque Lucas courut à lui.

Lucas.

Tiens, mon pauvre Gaspard, voici du pain qui me reste et un œuf dur ; je l’ai gardé pour toi.

Le père Thomas lui lança un regard terrible et lui arracha le pain qu’il offrait à son frère.

Le père Thomas.

Comment oses-tu lui donner à manger quand je lui en refuse ?

Lucas.

Parce que je ne fais pas de mal en lui donnant ma part du dîner, et alors je ne crains pas que vous me punissiez.

Le père Thomas.

Tu sais que je ne veux pas que chacun soit servi à part ; quand on est en retard, tant pis, on attend jusqu’au soir.

La mère.

Mais, Thomas, tu ne sais pas ce qui a retardé Gaspard. Vois donc comme il est pâle.

Thomas regarda Gaspard et dit d’un ton moqueur :

« Qu’est-ce que tu as ? Tu rages ? C’est ça, ta maladie ? »

Gaspard continua à garder le silence ; sa pâleur