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on est tout naturellement charitable, humble, doux, patient, dévoué, généreux ; et alors ces deux amours, se fondant dans un seul qui est l’amour de Dieu, nous rendent aussi parfaits que nous pouvons l’être en ce monde.

Camille. Mais, Grand’mère, comment peut-on aimer tous les hommes ? Comment pourrais-je aimer comme je vous aime, ceux qui vous offensent, qui vous chagrinent ? Ou bien, comment aimer des gens désagréables, maussades, ennemis du bon Dieu, comme j’aime les personnes aimables, bonnes, pieuses et qui m’aiment ?

Grand’mère. Chère enfant, le bon Dieu ne nous oblige pas d’aimer tout le monde de cœur, d’affection, de sympathie, de goût. Aimer les hommes, c’est n’avoir aucun mauvais sentiment contre eux ; c’est tâcher de faire tout le bien que nous pouvons ; c’est pardonner leurs torts ; c’est être indulgents pour leurs défauts ; c’est prier pour eux ; c’est désirer sincèrement leur amélioration et chercher à les y aider. C’est de cet amour-là que nous devons aimer tous les hommes.

Madeleine. Pourtant, Grand’mère, quand une personne m’a fait du mal, ou qu’elle cherche à m’en faire, je ne puis pas lui rendre des services et chercher à l’obliger comme si je l’aimais.

Grand’mère. C’est précisément là où est le mérite, mon enfant ; c’est l’effort, très-pénible, j’en conviens, que le bon Dieu te demande, qu’il récompensera magnifiquement ; obliger ceux qui nous aiment ou que nous aimons, c’est un bonheur, un vrai plaisir ; mais rendre service à ceux qui nous ont offensés et que notre cœur repousse, c’est un grand et généreux effort que Notre-Seigneur nous demande et dont il nous a