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Henriette. Grand’mère, je ne trouve pas du tout qu’Héli et ses abominables fils soient assez punis de leur mauvaise conduite. Si j’avais été le bon Dieu, il me semble que je les aurais punis bien autrement.

Grand’mère. Comme tu es féroce, ma chère petite ! toi qui es toujours si bonne et qui pardonnes si volontiers.

Henriette. Oh ! moi, grand’mère, c’est autre chose ; je n’ai à pardonner que de petites bêtises ; mais ces horribles gens, qui ont commis des sacrilèges toute leur vie, qui ont laissé prendre l’Arche sainte, laquelle contenait les tables de la loi, l’Arche dans laquelle parlait le bon Dieu, et ce père imbécile qui laisse faire tout cela, méritent des punitions terribles.

Grand’mère. Voyons, que je tâche de calmer ta fureur. D’abord, prenons Héli : le bon Dieu, qui est infiniment bon et juste, a fait la part de la tendresse paternelle, de l’exactitude que mettait Héli dans l’accomplissement de ses devoirs personnels. Héli avait passé sa vie à se désoler de la mauvaise conduite de ses fils et de sa faiblesse à leur égard. Dieu le punit dans ses plus chères affections, puisque la douleur qu’il a ressentie a causé sa mort. Et puis, s’il a eu quelque chose à expier, il ne faut pas oublier qu’il y a le purgatoire avant le paradis.

Quant à Ophni et à Phinée, leur punition a été d’abord dans ce monde par le mépris et l’éloignement de tous ceux qui les connaissaient, et, dans l’autre monde, l’éternité malheureuse, horrible, que le bon Dieu réserve aux méchants ; et, s’ils sont en enfer, depuis plus de trois mille ans qu’ils ont commencé leur punition, elle dure encore, et elle durera toujours. Si tu trouves que ce n’est pas assez, tu es bien difficile.

Henriette. Si fait, si fait, grand’mère, je désire même que le bon Dieu leur ait pardonné.

Grand’mère. À la bonne heure ; à présent, voyons ce que devient l’Arche entre les mains des Philistins.