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Rien ne déchire encor les ombres solennelles,
C’est la houle. Voici l’éclair d’un coup d’archet,
Puis le silence ; enfin tel qu’un blanc feu follet
Les trilles d’une flûte ou d’une chanterelle.

Une fugue apparaît du fond de l’horizon ;
Elle roule, grandit, s’approche, s’exaspère,
Et passe dans un souffle angoissant de colère,
Sombre et dure comme un passage de caissons.

Le souffle des hautbois se tait — puis recommence,
C’est une voile blanche au-dessus de la mer,
Il brille et chante, ainsi parmi les nuits d’hiver
Un feu qui tremble au loin ranime l’espérance.

Mais que les violons soudain prennent l’essor !
Leur voix monte, subtile et pure, jusqu’aux nues
Et délivre d’un coup les notes contenues
Au creux des noirs bassons et dans les harpes d’or.