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à fond noir des cieux du Ciel où règnent les Régents défunts… des mots qui peu à peu dessinent le plus beau portrait qu’on livrera jamais de « Celui qui régna durant la période Kouang-Siu » :

— Un enfant très intelligent et très doux, à l’âge d’un homme. Un savoir de vieillard qui ne se souviendrait pas d’être vieux. Parfois, uniquement préoccupé de femmes ; de ses femmes ; des princesses ou des suivantes qu’il appelait à son gré ou que la Vieille Douairière, sa tante, — qu’il nommait « Mère vénérée » — Lui préparait.

Oui, très intelligent, très affaibli, sauf aux premières heures du jour. Il aimait la poésie. Il caressait élégamment « du bout du pinceau, le papier tendre » — (ceci prononcé dans un rythme de citation chinoise). Il aimait aussi la musique…

René Leys s’interrompt. Le mot « musique » ne lui semble pas suffire à exprimer ce qu’il veut. Et il n’en trouve pas d’autre.

— Ou plutôt… il aimait à écouter ce qu’on effleure : un gong que l’on touche sans frapper : il en pâmait ! Il fallait le soutenir. Il demandait à voix basse qu’on le touchât de nouveau. Et quand le gong avait fini de vibrer, il écoutait jusqu’au bout du silence et pleurait alors à sanglots… Je l’ai vu regarder sans rien dire une peau de tambour…

René Leys accorde à ces souvenirs une trêve mélancolique. D’autre part, je perçois — à peine — le son de fer et de cuivre et d’étain étouffé de la