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1er octobre 1911. — Il me faut un nouvel effort pour m’apercevoir combien ma vie pékinoise s’est à la fois augmentée et rétrécie… J’ai tout d’abord perdu les leçons et les visites de Maître Wang… S’est-il offusqué des attentions naturelles que je prodiguais à sa femme ? Ou de l’intérêt que je portais à son co-professeur, René Leys ?… Il a disparu, sans bruit, discrètement, comme il était venu, ayant prétexté dans une lettre signée de lui, — mais dont je garantis beaucoup moins la traduction, signée de moi, — que l’un des Princes, qui l’employait autrefois au Ministère des Rites, exigeait qu’il reprît ses services à l’heure même de ma leçon.

L’excuse est polie. Archifausse, mais polie. Ce professeur me donne élégamment congé…

En revanche, mon autre Professeur redevient ponctuel, naturel, dans l’exercice de ses fonctions. Je m’étonne beaucoup moins de ce qu’il m’apprend ou me conte. Il a, dans tous ses mouvements en milieu chinois, l’aisance d’un poisson cyprin qui aurait vieilli dix ans dans le même — ou la même — vase, et qui n’a plus besoin de ses gros yeux ni de sa quadruple queue pour paître, voir et se conduire. J’ai