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« ordre » consiste éminemment dans le mépris de ceux qui le possèdent pour ceux qui l’ont manqué de peu… En quoi cette « distinction » ressemble à tous les ordres du monde…

L’autre titre est bien plus pesant, plus sonnant. René Leys est prêt à me chiffrer les mensualités qu’il devra désormais compter lui-même à chacun des Princes. C’est ainsi que ce brave « Pou-louen », bien connu des joueurs de billard européens et cependant ex-futur héritier du trône par son ancêtre direct, Tao-Kouang, dixième Empereur, Pou-louen, « émarge » pour onze mille taëls à chaque lune. Le Régent, pour cinquante-cinq mille… Quant à la Douairière Long-Yu, outre sa cassette particulière, savez-vous ce que lui rapporte le titre qu’elle porte ? Long-Yu !

— Oui, oui, on l’appelle Long-Yu.

— Ce n’est pas un nom ; c’est un titre, offert du bout du pinceau du Régent ; un titre qui la met au-dessus de toutes les vieilles concubines T’ong-tche… eh bien, ce titre lui vaut dix mille taëls… de plus tous les mois.

Je feins l’éblouissement : deux mots, deux caractères honorifiques, ont-ils donc à la Chine un si grand pouvoir financier ? Je comprends que la situation de René Leys soit solide : je totalise et je conclus :

— Vous me paraissez en bonne posture. Vous voilà donc en même temps ami du Régent et…