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avec l’inflexion de la voix équivalant au levé respectueux des deux poings réunis…

Et il se renferme dans le silence tardif qui suit d’ordinaire les moments où l’on feint, après coup, « d’en avoir trop dit ».

À mon tour de partir au galop. J’ai besoin de détente, de joie vive ! je suis follement gai. Il vient de me confirmer si crûment, si franchement dans l’aveu poétique de la lettre… Quel brave enfant ! Seul, j’aurais mis dix ans à entrebâiller la porte basse dont il m’ouvre les deux vantaux.

Quand je m’arrête un peu essoufflé, je le vois à la hauteur de l’épaule de mon cheval, me répéter d’un air attentif :

— Qu’est-ce que vous feriez à ma place ?

— À votre place, je me féliciterais d’abord d’en être arrivé là… Et puis j’essaierais de tenir le plus longtemps possible : les audiences de grande Dame relèvent d’un protocole assez capricieux… Et j’attendrais avec confiance qu’après m’avoir ouvert la porte au nez, on me la referme au derrière…

Oui, c’est bien ce qu’il fallait lui répondre… Il ne faut pas lui laisser monter ce grand cheval : Amour d’Impératrice. — Le sport est un peu trop près de l’écurie. Il faut surtout l’empêcher de prendre ceci très au sérieux… Je vois clair et mon conseil aura du bon : l’Impératrice a daigné tromper son veuvage en s’égayant de la présence auprès d’Elle, — pour quelques nuits, — de ce jeune Européen