Page:Segalen - René Leys.djvu/171

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— J’ai un conseil à vous demander.

— Entendu.

— Je voudrais savoir ce que vous feriez à ma place.

Qu’il me permette tout d’abord de m’y mettre, à sa place. Quelle est-elle, exactement ?

— Vous vous rappelez de cette concubine…

(J’ai fort envie de reprendre mon Professeur. « Vous rappelez-vous cette concubine… » Il est Belge et manifestement ému : double excuse…)

— Cette concubine que m’a offerte le Régent…

— Oui.

— À ma place, qu’est-ce que vous en feriez ?

Comment ! Ça n’est pas encore « fait » ?

Si j’avais le loisir de répondre, je répondrais certainement : « Suivez le conseil de l’ami de votre ami « Kouang-Siu » : « Vous vous étendrez sur elle et vous agirez »… mais il interrompt jusqu’au silence de mon conseil !

— Je ne veux pas dire… (Il rougit.) Enfin je ne sais pas s’il faut l’accepter officiellement.

— Acceptez, croyez-moi, acceptez au moins — officieusement. Vous m’avez dit que cette jeune offrande n’est déplaisante ni d’âge ni de formes. — Auriez-vous alors des raisons… politiques ?

Il saisit la perche que je lui plante.

— Oui, des raisons « politiques ». Elle ne le permettrait plus.

Il a donné au pronom « Elle » la même majuscule impérialissime qui se réserve rituellement à « Lui »,