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d’écailles dans l’air… Cet air est peuplé de génies qu’il vient de mettre à mal, je le suppose… je le sens… j’ai raison, car voici l’incarnation, le défilé batailleur de ces génies qui commence… L’homme rouge…

— C’est, me souffle dans l’oreille René Leys, c’est le professeur des acteurs Impériaux, le chef de la scène, au Palais.

Bien, bien. Je regarde. L’homme rouge est aux prises avec un incarné : un guerrier noir, caparaçonné de jaune, le visage atrocement peint, le dos hérissé de flèches de combat et de drapeaux, les sourcils relevés et prolongés du nez aux tempes… Un embonpoint de héros, — l’attitude rythmique et dansante d’un être invincible et terriblement sûr de lui.

L’escrime recommence : pas plus de chocs, mais des feintes, des sauts. Un silence d’armes effrayant dans le combat de l’orchestre de soie, de bois et de bronze déchaînés… Voilà ! le guerrier noir et jaune est vaincu, blessé à mort : il penche la tête, reçoit le coup sur la nuque,… puis s’en retourne dans la coulisse à petits pas, — figurant dont la tâche est finie…

À un autre. Celui-ci est d’autre couleur. Non moins belle. Il combat plus vaillamment, mais doit être vaincu de même : il reçoit le coup : il s’en va.

C’est ainsi que, par six fois, l’Homme Rouge aux poignets tourbillonnants fait des feintes, tourne et virevolte, pare un coup, en donne un autre et cepen-