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conique, — chapeau « chinois » depuis la conquête mandchoue, coiffure d’été, même en cérémonie ! — et les mains disparues dans les longues manches.

Il parle doucement, gravement, oui, gonflé d’une importance qui n’est point tout à fait la sienne…

Et puis il a fini de parler. Les autres s’inclinent. Je m’incline, et, suivant le Protocole, toujours tête basse, nous nous apprêtons à sortir à reculons. — Le cortège, peu accoutumé aux constructions chinoises, trébuche sur la grosse poutre qui barre solidement le seuil.

Quand on se relève, en respirant plus fort, et osant un dernier regard au fond de l’antre, il n’est plus là : la même trappe qui le fit apparaître, l’absorba : la tenture bleue est retombée sans un bruit.

Et, sur le chemin de retour, c’est une autre retombée qui m’obsède… J’entends autour de moi :

— En été, ça va bien ! Mais en hiver, ce qu’il doit falloir de poêles pour chauffer toutes ces bicoques !

(Ceci est proféré par un lieutenant d’artillerie).

— Et regardez-moi ça ! Cette espèce de tour qui a l’air d’une « bouteille de Pippermint » — (ajoute un autre qui désigne le stupa blanc, la Tour hindoue si peu à son aise ici). Comme c’est chinois ! Ça a l’air plein, est-ce pas ? Eh bien, c’est creux à l’intérieur. Ça contient un Bouddha de suif d’une religion inconnue !

J’affirme l’authenticité de ces paroles. Elles furent dites en cette circonstance par un capitaine du génie.