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qu’un, à moi. C’est assez considérable : ce garçon de dix-huit à vingt ans, cet étranger, ce barbare, ce Belge, vient d’être nommé, aujourd’hui même, à de hautes fonctions dans la Police Secrète de Pei-king.

Je m’y attendais un peu. Cela explique bien des choses. Mais je n’aurais jamais inventé le détail : se doutant depuis plusieurs mois que la vie du Régent n’était pas en sûreté, il s’était, par amitié pour le frère de son ami, l’Empereur mort, donné comme devoir de la protéger. Il écoutait ce qui se disait parmi les neveux et fils de Princes, et les eunuques et les femmes, — surtout aux fins de repas arrosés de vins de roses. Il avait eu l’idée de prier les chanteuses de bien écouter aussi. Et, la veille de l’attentat du pont de Heou-men, la Belle Policière — que j’avais tenue, à distance, dans mes mains, — dénonçait fort à propos la machine, et lui, René Leys, passant toute la nuit aux aguets, coupait les fils et sauvait le Régent.

Je comprends, après ce premier succès, combien peut être solide sa « situation » officieuse. Je le complimente. Il poursuit : ce résultat lui donne confiance. Il va multiplier les « policières » dans les maisons de Ts’ien-men-waï. On peut compter sur elles : il les paie, et elles obéissent mieux que des hommes. Ainsi, « Pureté Indiscutable » ne se livrera à l’acheteur qui l’aime, qu’au jour dit.

Déconvenue ! Il n’y a donc plus d’étranges amours !