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Ils vont. Leurs seuls abris… des tentes aux couleurs rances. Ils préparent une bouillie de grains, ayant récolté, pour le feu, la fiente sèche. Ils battent et conservent le lait, afin d’en tirer une graisse jaune dont ils font cas, — affamés ou miséreux à ce point de traire des femelles d’animaux !

Pour s’accoupler, ils ont ces femmes, peu différentes d’eux-mêmes, avec un grand visage d’antilopes, les cheveux nattés, les mollets forts et les pieds gros. — Est-ce donc rien de tout cela dont ils sont orgueilleux ? Est-ce pour rien de tout cela qu’ils marchent vers Lui, des mois entiers, sur ce dévers de la plus haute montagne ?

Aller ainsi est leur bien et leur richesse. Prêts à se battre, prêts à dormir, prêts à se partager en frères la même femme conjugale ; prêts à prier, prêts à mourir solitaires : voilà ce tribut secret, ce savoir, — la simplicité des cimes — voilà ce qu’ils transportent avec