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pait aux agrès, cambrée vers la mer. Ses pieds s’éclaboussaient d’écume.

Térii la considéra. Il dormait près d’elle depuis quatre nuits à peine. Elle ne semblait point égaler la femme Taümi en habiletés de toutes sortes. Il aviserait à son retour. D’ailleurs, les fêtes étaient proches où le haèré-po, montrant son savoir, acquerrait, avec de nouveaux tatu, le droit à choisir librement ses épouses. Et Térii, triomphant par avance, laissa courir son espoir vers les jours à venir qu’il lui semblait allègrement poursuivre sous la poussée du grand vent régulier.

Le rivage fuyait allègrement lui-même. Les vallées qui pénètrent l’île s’ouvraient tour à tour, bâillaient un instant vers la mer, et se fermaient en reculant. Comme il était prêt de doubler une pointe, Térii, soudain, tourna le museau du pahi droit au large : on ne pouvait, en effet, se mésaventurer près de la terre Mara, dont la montagne avancée, surplombant lourdement les eaux, sépare, ainsi qu’une monstrueuse idole Tii, la noble vallée Papara, des turbulents territoires Atahuru.

La même crête divise les espaces dans le ciel. Car les nuées chargées de pluie, s’épanchent sur ses flancs sans jamais en passer le revers. Les petits enfants n’ignorent pas cela. Voici le parler connu seulement des prêtres : le pied du mont, creusé d’une grotte froide, suintante et sans fond, donne depuis trois lunaisons retraite à Tino, l’homme-inspiré. On le