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Alors seulement les arrivants déclarent : — « Nous avons perdu Havaï-i ! Nous cherchons les signes-parleurs ». Atumosikava répond : « Havaï-i ? C’est Savaï-i des Samoa ! Mais les vents n’y conduisent point. » Les signes ? Le chef dit ignorer les signes. Il ne connaît rien qui empêche les paroles de mourir. Et puis, c’est affaire aux prêtres !

Les prêtres ? Ils disent ignorer aussi. Ne suffit-il point des petits bâtons et des cordelettes nouées ? Paofaï méprise. Tout cela, jeux d’enfants.

Mais un homme maigre, aux yeux vifs, et dont les oreilles appesanties d’anneaux traînent sur les épaules, prend le parler tout seul. Il dit connaître les signes.

— « D’où viens-tu, toi ?

— Ma terre est nommée : Nombril-du-monde. Et moi, Tumahéké. Ma terre nage au milieu de la très grande mer toute ronde et déserte — ainsi qu’un nombril, ornement d’un ventre large et poli. On l’appelle aussi Vaïhu[1].

» Le sol est dur, poudroyant de poussière rouge et noire, desséché, caverneux. Seulement une petite herbe courte le revêt. Les rivières manquent. L’île a soif. Mais ses habitants sont ingénieux plus que tous

  1. Île de Pâques.