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ver ! que ce fils, cloué sur un arbre au sommet d’une montagne, mourut abandonné des siens ; que depuis lors tous ses disciples — bien qu’assez pervers et méprisables — sont assurés, s’ils se confient en Lui, de le joindre dans une demeure divinement joyeuse et comparable aux plus beaux faré de chefs. Ce nouvel atua, l’étranger révélait son nom : « Iésu-Kérito ».

Des gens allaient se récrier ; quand le discoureur, plus habile, affirma fortement que les vivants des terres Tahiti, Mooréa, Raïatéa, ne naissent pas moins que les Piritané, enfants de ce Iésu ; et que, si les nouveaux venus s’aventuraient dans ces pays aussi lointains de leur propre pays, c’était pour enseigner à tous l’amour de l’atua bienfaisant, et le chemin de cette vie qui ne doit point finir.

Alors, on dévisagea l’orateur. Son récit devenait imprévu, certes, et singulier, plus que toutes les chansons familières aux matelots blêmes — dont la langue pourtant est vive, et les parlers ébahissants. Les dieux, dans les firmaments du dehors, s’inquiètent donc des hommes maori ? Jamais les atua sur les nuages de ces îles, n’ont eu souci des peuples qui mangent au delà des eaux ! Quant à « cette vie qui ne doit point finir », on savait, sur la foi des Dires conservés, que Té Fatu, le maître, la déniait à tous, malgré les supplications de Hina :

« Sois bon », murmurait en implorant la douce femme lunaire…

« Je serai bon ! » avait concédé le Très-Puissant.