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M. Vanderk fils.

Je ne voulais pas dire cela.

M. Vanderk père.

Écoutez : le compte le plus rigide qu’un père doive à son fils est celui de l’honneur qu’il a reçu de ses ancêtres : asseyez-vous. (Le père s’assied ; le fils prend un siège et s’assied ensuite.) J’ai été élevé par votre bisaïeul ; mon père fut tué fort jeune à la tête de son régiment. Si vous étiez moins raisonnable, je ne vous confierais pas l’histoire de ma jeunesse, et la voici : Votre mère, fille d’un gentilhomme voisin, a été ma seule et unique passion. Dans l’âge où l’on ne choisit pas, j’ai eu le bonheur de bien choisir. Un jeune officier, venu en quartier d’hiver dans la province, trouva mauvais qu’un enfant de seize ans, c’était mon âge, attirât les attentions d’un autre enfant : votre mère n’avait pas douze ans ; il me traita avec une hauteur… Je ne le supportai pas ; nous nous battîmes.

M. Vanderk fils.

Vous vous battîtes ?

M. Vanderk père.

Oui, mon fils.

M. Vanderk fils.

Au pistolet ?

M. Vanderk père.

Non, à l’épée. Je fus forcé de quitter la province : votre mère me jura une constance qu’elle a eue toute sa vie ; je m’embarquai. Un bon Hollandais, propriétaire du bâtiment sur lequel j’étais, me prit en affection. Nous fûmes attaqués, et je lui fus utile (c’est là où j’ai connu Antoine). Le bon marchand m’associa à son commerce ; il m’offrit sa nièce et sa fortune. Je lui dis mes engagements ; il m’approuve. Il part, il obtient le consentement des parents de votre mère ; il me l’amène avec sa nourrice : c’est cette bonne vieille qui est ici.