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SONNET.

 Ie m’embarque ioyeux & ma voile pompeuſe
M’oſte deſia la terre & me donne les mers,
Je ne voi que le ciel uni aux ſillons pers ;
C’eſt le premier eſtat de mon ame amoureuſe.
 Puis ie voi s’eſleuer vne vapeur confuſe,
Ombrageant tout le ciel qui ſe fend en eſclairs,
Le tonnerre grondant s’anime par les airs ;
c’eſt le ſecond eſtat dont elle eſt langoureuſe.
 Le troiſieſme eſt le flot hideuſement friſé,
Le maſt rompu des vents & le timon briſé,
Le nauire enfondrant, la perte de courage ;
 Le quatrieſme eſt la mort entre les flots ſalez.
Abbatus, rebatus, vomis & aualez ;
Bref mon Amour n’eſt rien qu’vn horrible naufrage.


A. D. V.