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SONNET.

Heureux celui qui d’vn braue courage
 Fait le bucher de ſa mortalité,
 Et d’un plein ſault franchit l’humanité,
 Vif tourbillon de la flamme volage.
Les immortels aſſis ſur le nüage,
 Pompeux de gloire & de l’infinité,
 Applaudiſſans à ſa diuinité,
 Souffrent qu’il ayt le ciel pour ſon partage :
Mais plus qu’heureux & plus que glorieux
 L’homme mortel qui ſe bruſle en tes yeux,
 Eſuanouy dans ton giron Madame.
Il ne craint point l’audace des mortels,
 Ni le courroux des puiſſans immortels :
 Car il eſt Dieu & en corps & en ame.


A. D. V.





MVZAIN.

 
Avant que ce Muguet vous euſt entretenue
 Ie n’adoroi que vous, vous n’adoriez que moi,
 Front à front, ſein à ſein, bras à bras, nud à nuë,
 Vous paſmiez ſouſpirant, ſouſpirant ie paſmoi :
Mais quand ie voi le cours de voſtre Amour volage ;
 Ie ſecouë les nœuds dont vous me teniez pris :
 Vous n’aurez iamais plus sur mon ſein aduantage,
 Nous verrons qui des deux portera le dommage,
 Ie ſerai Mars ſanglant ſi vous eſtes Cypris.


A. D. V.