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MVZAIN.

 
Enſeueli tout vif dans ma peine cruelle,
Ie vay trainant ſans fin le tõbeau de ma voix,
Qui reſpond aux fureurs d’Amour qui me bourrelle :
Echo reſpond ainsi au bucheron des bois :
 Mais ne me voi-ie pas ainſi qu’vne ombre bleſme,
Qui me ſuit en tous lieux ſeruante de douleurs :
Non, non, je ſuis pluſtoſt en ma douleur extreme,
Vn mort vif, vn vif mort, ou pluſtoſt le rien meſme :
Car le rien, comme on dict, est malheur des malheurs.


A. D. V.





SONNET.

 
Esprits ardãts coureurs qui animez le foudre,
Et vous Anges legers qui agitez les ers,
Ames qui ébranſlez les flots du monde pers,
Et vous démons peſans qui rampez sur la pouldre :
 Pourriez-vous chers eſprits, doctement me reſouldre,
De quoi ſont ces beaux yeux pour leſquels ie me pers ?
Sont-ils d’er ou de feu, de terre ou bien des mers,
Qu’ils puiſſent m’animer & ſoudain me diſſoudre ?
 Fuiez pauures démons si vous ne le ſçauez,
Autrement vous ſerez comme moi entrauez,
Et perdrez par le feu le plus ſain de voz formes.
 Mais c’eſt par trop reſué, vous ne le ſçauez pas :
Car ſi vous le ſçauiez, vous tendriez des appas,
Qui vous rendroient ſeigneurs & des dieux & des hommes.


A. D. V.