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que cette courageuſe Fille fut conduite devant luy par ſes Gardes. Apres qu’elle eut ſalüé ce Prince avec tout le reſpect qu’elle luy devoit, mais auſſi avec toute la hardieſſe d’une perſonne innocente : Et bien Marteſie, luy dit il, vous avez eſté la Confidente de Mandane & d’Artamene ? & c’eſt de voſtre bouche que je dois entendre la verité, quoy que je la sçache par d’autres voyes. Seigneur, luy dit elle, comme je ne sçay rien qui puiſſe nuire aux deux illuſtres Perſonnés que vous nommez, je n’auray pas grand peine à me reſoudre de vous la dire. Quoy Marteſie, reprit le Roy en colere, vous croyez que ce ſoit une choſe advantageuſe à Mandane, que d’aimer Artamene, comme il faut qu’elle l’aime infalliblement ? Je croy. Seigneur, reprit elle, que la Princeſſe ſeroit une des plus déraiſonnables perſonnes du monde, n’elle ne l’eſtimoit pas : & une des plus ingrattes, ſi le croyant auſſi innocent qu’il eſt, elle n’avoit pas beaucoup de reconnoiſſance des ſervices qu’il a rendus à voſtre Majeſte. Mais, Seigneur, tous les ſentimens de la Princeſſe pour Artamene, ſont renfermez en ces deux choſes, elle l’eſtime, & elle ſe croit ſon obligée. Mais Marteſie, reprit le Roy, les Princeſſes vertueuſes qui n’ont que de l’eſtime & de la reconnoiſſance pour un ſimple Chevalier comme Artamene, ne leur donnent point de Portraits : Ha ! Seigneur, s’eſcria Marteſie, la Princeſſe n’a jamais donné de Portrait à Artamene : & s’il s’en eſt trouvé un entre ſes mains, il faut que Feraulas qui eſt fort de mes Amis, & a qui je lay baillé comme une tres belle choſe, le luy ait monſtré par un pareil ſentiment. Ce Portrait la Seigneur, n’a pas meſme eſte