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amoureux, & que Mandane le sçache & le ſouffre ; je dois faire perir Artamene, & je dois abandonner Mandane. Mais pour faire l’un & l’autre, il faut deſhonnorer ma Fille aux yeux de toute l’Aſie : & il faut me deſhonnorer moy meſme. Seigneur, reprit alors le meſchant Metrobate, j’eſpere que vôtre Majeſté n’en viendra pas là : mais quand il ſeroit vray (ce que je ne penſe pourtant pas) qu’Artamene fuſt aſſez criminel pour vous obliger à le faire perir : vous ne manqueriez pas d’autres pretextes, ſans y meſler la Princeſſe. Mais, Seigneur, adjouſta t’il, il me ſemble touſjours que voſtre Majeſté ne ſera pas mal, de ne delivrer pas ſi toſt Artamene : de taſcher de s’eſclaircir un peu mieux des choſes : de le refferrer un peu plus qu’il n’eſt preſentement : car il me ſemble que ces Troupes de Cilicie qui ſont arrivées comme on ne les attendoit pas, & que Philoxipe envoye à Artamene pour vous les preſenter, vous doivent eſtre un peu ſuspectes : y en ayant deſja de Chipre dans voſtre Armée y qui n’y ſont auſſi que par ſon moyen. Et en effet, s’il vous en ſouvient, le Prince Artibie parla à votre Majeſté d’une maniere aſſez eſtrange : & Megabiſe meſme à ſon retour d Armenie vous a dit des choſes, qui me ſont conjecturer qu’il y a quelque deſſein cache, qui ne doit peut-eſtre eſclater que lors que l’on aura delivrée Artamene. Que sçait on, Seigneur, adjouſta Metrobate, ſi tout ce que l’on dit de la Princeſſe eſt vray ? Les Amis d’Anamene la retiennent peut-eſtre par force en quelque lieu : & il y a enfin quelque choſe en tout cela, qui merite qu’on s’en eſclaircisse : & ſi voſtre Majeſte me l’ordonne, je ſeray tous mes efforts, pour taſcher de deſcouvrir ce que c’eſt. Le Roy qui avoit l’ame en une inquietude eſtrange, le luy