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Ayant donc des armes ſi puiſſantes pour nuire à Artamene, il fut au coucher du Roy, que le traitoit fort bien : car ce Prince qui sçavoit de quelle ſorte Aribée l’avoit aimé, croyoit que puis que Metrobate ne s’eſtoit pas engage dans ſon Parti, c’eſtoit une marque infaillible de ſa fidélité : ne sçaçhant pas que cét homme n’eſtoit demeure aupres de luy, que comme un Eſpion d’Aribée.

Metrobate donc eſtant le ſoir aupres du Roy, à une heure où il n’y avoit plus perſonne qui peuſt l’empeſcher de parler avec liberté, penſa faire reüſſir ſon deſſein. Neantmoins comme il euſt bien voulu ne commencer pas à parler d’Artamene, il attendit quelque temps pour voir ſi ce Prince qui n’avoit l’eſprit rempli que de la guere d’Armenie, de la captivité de la Princeſſe Mandane ; & de la liberté d’Artamene, ne diroit point quelque choſe qui luy donnait lieu d’executer ſon entrepriſe, ſans qu’il paruſt nulle affectation en ſon diſcours. En effect Ciaxare ne manqua pas de luy en donner l’occaſion telle qu’il la ſouhaitoit. Metrobate, luy dit il, eſtes vous de l’opinion de ceux qui m’aſſurent qu’Artamene me ſervira avec autant d’ardeur & autant de fidelité qu’il a fait autrefois ? & ne craignez vous point que cette Grande Ame que l’on a touſjours remarquée en luy, ne luy permette pas de pouvoir oublier ſa priſon, & ne puiſſe ſouffrir qu’il ſe reſſouvienne de mes anciens bienfaits ? Je croy Seigneur, repliqua Metrobate, qu’Artamene oubliera tout, & ſe ſouviendra de tout, pour delivrer la Princeſſe Mandane : Mais encore, luy dit le Roy, n’y a t’il point moyen de pouvoir deviner quel eſt le ſecret que je ne dois plus demander, puis que je ſuis reſolu de delivrer