ceux de la Marine : & que Piſistrate, que vous connuſtes ſans doute quand vous paſſastes à Athenes, l’eſtoit de ceux de la Montagne. De ſorte qu’encore qu’effectivement tout ce grand Peuple euſt gardé ſes Loix depuis ſon départ, les choſes eſtoient pourtant en eſtat de changer bientoſt de face. Solon eſtant donc preſſé de partir en peu de jours, dit à Philoxipe que l’intereſt de la Patrie eſtoit preferable à tout : & que celuy qui avoit bien voulu cacher ſa fille, pluſtost que de l’expoſer à donner de l’amour à un Tyran, n’abandonneroit pas ſon païs, pour attendre inutilement des nouvelles d’une Perſonne que les Dieux conſerveroient ſans doute ſi elle s’en rendoit digne : Qu’ainſi il n’avoit plus qu’à luy laiſſer un pouvoir abſolu de l’eſpouser s’il la retrouvoit. Philoxipe fort affligé & fort content tout enſemble, remercia Solon de l’honneur qu’il luy faiſoit : Mais comme le vent ne ſe trouva pas propre pour partir, & que ſon Vaiſſeau n’eſtoit pas preſt, il falut qu’il euſt patience. Durant cét intervale Solon sçeut qu’il y avoit un Temple celebre à cent cinquante ſtades de Paphos, dedié comme preſque tous les autres de l’Iſle à Venus Uranie : où l’on diſoit que cette Deeſſe ſe plaiſoit plus d’eſtre honnorée qu’en aucun autre : parce que c’eſtoit la couſtume que toutes les ceremonies en eſtoient faites par des Filles de condition, qui ſe voüoient au ſervice de la Deeſſe, & qui la ſervoient trois ans dans ſon Temple, avant que d’eſtre mariées. Solon qui creût ne pouvoir mieux employer le temps qui luy reſtoit à demeurer en Chipre malgré luy, parce que le vent n’eſtoit pas propre, & que ſon Vaiſſeau comme je l’ay dit, n’eſtoit pas encore en eſtat de faire voile. Croyant, dis-je, ne pouvoir
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