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eu l’eſprit fort inquiet, cette Princeſſe ne fut pas fort ſatisfaite de ſa converſation ; & ne sçavoit à quoy attribuer la cauſe du changement qu’elle voyoit en luy. Au ſortir de là, il dit encore cent choſes obligeantes à Philoxipe : & Philoxipe luy fit encore cent proteſtations ſon in-de ſensibilité pour Aretaphile. Mais enfin, pour accourcir mou diſcours autant que je le pourray, Philoxipe perſecuté de l’imagination du Roy ; en colere du diſcours de Cleanthe ; affligé de celuy de Policrite ; & bien plus encore de ne la voir point, & de n’oſer retourner à Clairie, tomba malade, & meſme dangereuſement malade. Tous les Medecins diſoient que ſi l’on ne trouvoit quelque remede à ſa melancolie, il mourroit infailliblement. La fièvre luy dura ſept jours tres violente : pendant leſquels le Roy eſtoit inconſolable ; & pendant leſquels j’eſtois allé faire un petit voyage à Amathuſe, pour quelques affaires que j’y avois : car je penſe que ſi j’euſſe eſté à Paphos, j’euſſe bien eu de la peine à ne deſcouvrir pas au Roy le ſecret de Philoxipe. Toutes les fois que le Roy entroit dans ſa Chambre, & qu’il le voyoit en ce pitoyable eſtat, il faiſoit une ferme reſolution de ne ſonger plus à Aretaphile : mais dés qu’il en eſtoit ſorty, ou qu’il amandoit un peu à Philoxipe, cette reſolution devenoit moins forte ; & la choſe eſtoit encore douteuſe dans ſon eſprit. Mais enfin la fièvre ayant quitté cét illuſtre Malade, & les Medecins ne laiſſant pas de dire apres cela qu’il mourroit infailliblement, ſi on ne luy oſtoit la cauſe du chagrin qui faiſoit ſes maux : le Roy ſembla avoir pris une reſolution tres forte, de s’arracher de l’ame la paſſion qui le poſſedoit. Il ſe reſolut donc, de n’aller plus chez Aretaphile : qui ne sçachant