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troublent l’ame, mais qui ne la poſſedent pas long temps : comme je veux eſperer que fera celle dont vous vous pleignez. Non non, dit il, Leontidas, ne vous y trompez point : j’aimeray Policrite juſques au Tombeau. Mais, Seigneur, pour n’abuſer pas de voſtre patience, je vous diray que connoiſſant le mal de Philoxipe trop grand pour le pouvoir guerir, je le flatay & l’adoucis autant qu’il me fut poſſible : en fuiſſe il me mena dans ſa Galerie, pour me monſtrer ſon excuſe, quoy que j’euſſe veû ſes Peintures beaucoup d’autres fois. Apres nous allaſmes nous promner : mais comme il ne pouvoit jamais aller que d’un coſté, nous fuſmes parmy ces Rochers, juſques à un endroit d’où l’on deſcouvroit la petite Maiſon de Policrite. Nous ne la viſmes pas ſi toſt, que rougiſſant d’amour & de confuſion tout enſemble ; c’eſt là, me dit il, mon cher Leontidas, que demeure la Perſonne que j’adore : c’eſt ſous ce petit Toict : que je preſere aux plus ſuperbes Palais, que Philoxipe trouve quelques momens de plaiſir : & c’eſt là enfin qu’eſt renfermée toute ma joye, & toute ma felicité. Seigneur, luy dis-je, il ne faut pas de meilleures marques de la grande beauté de Policrite, que la petiteſſe de ſa Cabane : & quiconque s’imaginera que le Prince Philoxipe aime en ce lieu là, ne doutera meſme point qu’il n’ait diſputé ſon cœur autant qu’il a pû. Enfin Seigneur, apres que ce Prince m’eut bien exageré toutes les beautez & tous les charmes de Policrite, ſans vouloir ſouffrir que je la viſſe, tant il avoit peur de la fâcher ; il falut ſonger à revoir Paphos : car j’avois promis au Roy d’y retourner dés le ſoir meſme. Je demanday donc à Philoxipe ce que je luy dirois : toutes choſes, me reſpondit-