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ne voyoit perſonne ; qui paſſoit toute ſa vie à aller deſſigner parmy ces Rochers ; & qu’ils luy voyoient preſque toujours prendre le chemin de la Source de Clarie. Philoxipe n’en pouvant sçavoir autre choſe, fit ce qu’il pût pour ne ſonger plus à cette rencontre : Mais quoy qu’il euſt reſolu de partir le lendemain, & des en retourner à Paphos, il demeura à Clarie (car ſa belle Maiſon porte le Nom de la Riviere qui y paſſe) & quelque deſſein qu’il euſt fait de ne retourner plus chercher la belle Inconnüe ; ſes pas malgré qu’il en euſt, le portoient touſjours vers le lieu où il l’avoit rencontrée. Ils s’en revint pluſieurs fois, ſans sçavoir non plus pourquoy il euſt bien voulu n’y aller pas, que la raiſon pour laquelle il y alloit ſans en avoir l’intention : Mais enfin cedant à ſa curioſité, il retourna parmy ſes Rochers, reſolu de ſe laiſſer conduire au hazard : laiſſant touſjours ſon Eſcuyer & ſon cheval au meſme lieu où il les avoit laiſſez la premiere fois. Il erra donc long temps parmy ces Montagnes : & ſe trouvant un peu las il s’aſſit : mais à peine ſe fut il mis ſur une Roche, d’où il découvroit de fort loing ; qu’il vit une petite Habitation entre des Rochers, en un lieu qui luy paru : fort ſauvage. Si bien que ſe relevant, peut— eſtre, dit il en luy meſme, eſt ce en ce lieu là que les Dieux ont caché le Threſor que je viens chercher. En effet, il n’eut pas marché trente pas, qu’il vit la belle Inconnuë, accompagnée de ce meſme Vieillard, de cette meſme Femme qu’il avoit deſja veüe une autre fois, & de trois ou quatre autres, toutes habillées ſimplement : qui ſembloient prendre un chemin deſtourné, pour s’en aller à un petit Temple qui eſt vers le coſté de la Mer ; & que l’on a baſty pour la commodité des Eſtrangers