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par le ſoing que l’on apporte à meriter la veritable gloire ; à acquérir la politeſſe ; & à taſcher d’avoir cét air galant & agreable dans la converſation, que l’amour ſeulement peut inſpirer. Voila donc Seigneur, quelle eſt preſentement noſtre Iſle : tous les plaiſirs y ſont, mais, ils y ſont innocents : l’amour en eſt la paſſion dominante & univerſelle : mais c’eſt une paſſion, qui n’eſt point incompatible avec la vertu ny avec la modeſtie, & qui n’empeſche pas qu’il n’y ait pluſieurs Amants qui ſe pleignent de la rigueur de leurs Maiſtresses. Les Feſtes publiques y ſont tres frequentes : les converſations aſſez libres, & fort ſpirituelles : les Jeux de prix fort ordinaires : les Bals tres divertiſſans : la Muſique fort charmante : & les femmes en general infiniment belles, extrémement galantes. & parfaitement vertueuſes. Mais entre les autres, la Princeſſe de Salamis, Sœur de Philoxipe, eſtoit l’Aſtre de la Cour, auparavant qu’elle s’en fuſt retirée : la Princeſſe Agariſte qui eſt aujourd’huy Princeſſe de Cilicie, & auſſi fort agreable : & l’illuſtre Aretaphile a ſans doute un éclat fort extraordinaire. Outre celles là, il y en a encore une appellée Thimoclée, & cent autres un peu au déſſous de cette condition, qui ſont admirablement belles : & je penſe Seigneur, que vous en viſtes une partie, quand vous vintes en noſtre Iſle ; & que je vous importune, en vous diſant des choſes que vous n’ignorez pas.

Pour ne continuer donc point cette faute, je me haſteray de vous faire ſouvenir en peu de mots, que le Roy qui regne aujourd’huy en Chipre, n’a pas plus de deux ans plus que le Prince Philoxipe : que vous avez sçeu ſans doute eſtre deſcendu de la Race de Demophoon, fils de Theſée, qui eſt en