Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/495

Cette page n’a pas encore été corrigée

de fer, de feu, & de ſang : qui ſe veulent faire aimer, par les meſmes voyes que l’on ſe peut faire haïr : qui n’ont que des ſentimens coupables ; qui ne pretendent qu’à des faveurs criminelles : & qui ne les demandent que le poignard à la main, & la fureur dans les yeux : je ne devrois pas craindre que l’illuſtre Mandane les preferaſt à Artamene. Mais Chriſante, ce que vous venez de me dire, m’eſpouvante aveque raiſon : & de la façon dont vous m’avez raconté la choſe, les Raviſſeurs de Mandane me ſont cent mille fois plus redoutables qu’ils ne me le ſeroient s’ils eſtoient moins raiſonnables & moins ſoumis. Mais Seigneur, interrompit Feraulas, le Roy d’Aſſirie n’eſt pas aupres de Mandane : l’on vous a aſſuré que le Prince Mazare n’eſt plus : & elle eſt entre les mains d’un Roy ſans Royaume. Il eſt vray, reprit il, mais ce Roy ſans Couronne en merite cent : & c’eſt ce qui fait mon inquietude. Neantmoins il y avoit des momens, où il eſtoit bien aiſe de sçavoir que la Princeſſe eſtoit en Armenie : & d’autres auſſi, où il en eſtoit bien fâché. Car ſi la vertu de Tigrane luy donnoit quelque conſolation : l’humeur violente & ambitieuſe du Roy d’Armenie ſon Pere, luy donnoit de la crainte & du chagrin. Feraulas s’aquita alors de la commiſſion que Marteſie luy avoit donnée, de faire ſes compliments à Artamene, qui les reçeut ſi agreablement ; qu’il renvoya Feraulas à l’heure meſme vers elle, pour luy teſmoigner le regret qu’il avoit de n’eſtre pas en eſtat de luy aller dire luy meſme tout ce qu’il penſoit : & combien il ſe tenoit ſon obligé, de luy avoir fait sçavoir par luy, tous les ſentimens de la Princeſſe. Il envoya auſſi Chriſante vers les Princes qui s’intereſſoient en ſa