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qui eſtimoit beaucoup ſa vertu, eſtoit auſſi bien aiſe de l’entretenir. Cependant auparavant que de ſe ſeparer, ils luy raconterent en peu de mots ſuivant leur promeſſe, tout ce qui eſtoit arrivé à Artamene : tant à ſon voyage des Maſſagettes, qu’à ſon retour en Capadoce, & qu’à la guerre d’Aſſirie. Ils luy dirent meſme la pitoyable rencontre qu’Artamene avoit fait de Mazare mourant : qui effectivement avoit eu entre ſes mains l’Eſcharpe dont elle leur avoit parlé : & qu’Artamene avoit reconnüe, pour eſtre la meſme que Mandane luy avoit autrefois refuſée, lors qu’il eſtoit preſt d’aller combattre. Mais, adjouſta Feraulas, il a eu bien plus de douceur en la recevant, qu’il n’en eut lors qu’on ne la luy voulut pas donner. En verité, dit Marteſie, le deſtin de cette Eſcharpe a quelque choſe d’eſtrange : Car imaginez bien je vous prie, par quelle bizarre voye, elle eſt venüe entre les mains d’Artamene. Premierement il faut sçavoir que c’eſt un Tiſſu d’or admirable, où la Princeſſe meſme a quelques fois travaillé pour ſe divertir : & c’eſt la raiſon pour laquelle elle luy a touſjours eſté infiniment chere : de ſorte qu’elle avoit plus d’une raiſon de la refuſer à Artamene, lors qu’il la luy demanda à Aniſe. Mais comme ſi elle luy fuſt devenüe encore plus precieuſe, depuis qu’Artamene en avoit eu envie ; elle ne la porta plus : & me commanda d’en avoir un ſoing tres particulier. En ſuitte nous revinſmes à Sinope, où je l’aportay : & quand nous partiſmes pour aller à Amaſie, & de là à Themiſcire, je la laiſſay icy avec cent autres choſes qui eſtoient à la Princeſſe. Si bien que quand nous y revinſmes avec