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par le chemin qu’elle avoit pris, l’enfermeroit infailliblement entre les deux. Artamene à cette nouvelle eut du moins beaucoup de joye, d’aprendre que cela n’estoit pas encore : & que par un partage que Chrisante avoit reconnu, & que les ennemis n’avoient pas gardé, il luy seroit facile de passer. En effet, estans montez à cheval un moment apres le retour de Chrisante, nous marchasmes avec tant de diligence, & si à propos ; que la nuit favorisant nostre dessein, & cachant nostre marche, nous nous rendismes au Camp, sans avoir rencontré personne. Je ne m’arreste point, Seigneur à vous exagerer laioye que receurent tous les Officiers & tous les Soldats, lors qu’ils virent Artamene : luy qu’ils regardoient comme un Dieu, & qu’ils croyoient tous invincible. Aussi tost qu’il fut arrivé, il fit la reveuë de son Armée : qui ne se trouva monter qu’à seize mille hommes seulement. De sorte que bien que toutes ces Troupes fussent effectivement les meilleures de toute la Capadoce, Artamene ne laissoit pas d’estre fort embarrassé. Car enfin l’Armée du Roy de Pont qui avoit quitté ses retranchemens, & de qui l’Avant-garde estoit à veuë de celle de mon Maistre, estoit de vingt mille hommes : & celle qui devoit arriver le foie à trente Stades de luy, estoit de quinze mille hommes effectifs. Se voyant donc réduit en cette extrémité ; & jugeant bien qu’auparavant que Ciaxare le peust sçavoir, les ennemis l’auroient forcé de combattre, & l’auroient vaincu : il prit une resolution aussi hardie, que personne en ait jamais pris. Bien est il vray, qu’outre les raisons que j’ay dites, il y en eut encore une autre, qui à mon advis, ne fut pas de petite consideration dans son esprit. Il sçavoit que Philidaspe devanceroit