Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/433

Cette page n’a pas encore été corrigée

ce deſordre : & ſe reſoluoit de prendre la ſeule voye par laquelle l’inſolence populaire peut eſtre remiſe à la raiſon : qui eſt celle de l’exemple & du chaſtiment des plus mutins & des plus ſuperbes. Mais comme la choſe ne ſe pouvoit pas faire ſans quelque danger, parce que ſi les Aſſiegeans faiſoient une attaque, dans le meſme moment que le Peuple ſeroit le plus eſmeu, il ſeroit à craindre de ſuccomber : le Roy d’Aſſirie aprehendoit un peu de ne pouvoir ſauver la Princeſſe : principalement la nuit, qui eſtoit le temps où les Aſſiegeans donnoient le plus ſouvent des alarmes : & le temps auſſi où le Peuple entreprenoit le plus de choſes : parce que dans l’oſcurité l’on ne pouvoit connoiſtre ceux qui agiſſoient avec violence, en ces occaſions tumultueuſes.

Il conſulta donc avec Mazare là deſſus : qui luy dit qu’il y avoit touſjours beaucoup de prudence, à ceux qui ſe reſoluent à ne fuir point, de sçavoir du moins comment ils ne pourroient faire, ſi la neceſſité le vouloit, & que l’envie leur en priſt. Vous avez raiſon, luy dit le Roy d’Aſſirie, car apres tout, & Babilone, & la Couronne ne me ſont rien, en comparaiſon de Mandane. Joint qu’en cette occaſion, ſi je perdois Mandane, je ſerois expoſé à perdre le Sceptre auſſi bien qu’elle : n’eſtant pas à croire que le Peuple en demeuraſt là : ny que l’on peuſt m’oſter la Princeſſe ſans m’oſter la vie. La difficulté eſtoit de trouver les moyens d’échaper, & de ſortir de Babilone, ſi l’on y eſtoit contraint : car pour un lieu de retraite, il n’en eſtoit pas en peine. Aribée comme vous sçavez, tenant la moitié de la Capadoce, & eſtant alors dans Pterie, il ne pouvoit pas choiſir un meilleur Azile.