Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/428

Cette page n’a pas encore été corrigée

qui l’agitoit, les longues treſſes de ſes cheveux ſe deſnoüerent d’elles meſmes, & s’eſparpillerent ſur ſes eſpaules ; & ſe levant, & ſe tournant vers le Roy d’Aſſirie, le viſage tout changé ; les yeux plus brillans qu’à l’ordinaire ; le teint plus vermeil ; & le ſon de la voix de beaucoup plus eſclatant ; elle prononça diſtinctement ces paroles.


ORACLE.

Il l’eſt permis d’eſperer,
De la faire ſouspirer,
Malgré ſa haine :
Car un jour entre ſes bras,
Tu rencontreras
La fin de ta peine.

Je vous laiſſe à penſer, Chriſante, qu’elle joye fut celle du Roy d’Aſſirie ; quelle douleur fut celle de Mandane ; quel deſespoir fut celuy de Mazare, quoy qu’il n’oſast le teſmoigner ; & quelle ſurprise fut la mienne. En verité je ne sçaurois vous exprimer la choſe telle qu’elle fut : car nous sçavions preſque de certitude, qu’il ne pouvoit y avoir de fourbe en cet Oracle : puis qu’outre que le Roy n’avoit pas pû deviner que la Princeſſe iroit en ce lieu là ; il eſt encore certain qui cette Femme eſtoit en une reputation d’un ſainteté admirable ; ce qui ne permettoit pas de la pouvoir ſoubçonner d’aucun artifice. Auſſi eſtoit-ce par cette reputation que la Princeſſe avoit eu la curioſité de la voir : Mais Dieux, que cette curioſité luy couſta de larmes ! Elle ſortit de ce Temple un moment apres, ſans