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pour luy : & ne laiſſa pas de continuer le deſſein qu’il avoit eu de s’informer de ce qu’il devoit attendre de ſa paſſion. Mais devant que de parler à celle qui l’en devoit inſtruire ; il s’aprocha de la Princeſſe, & luy dit fort civilement. Vous venez ſans doute, Madame, ſoliciter contre le Roy d’Aſſirie : mais auparavant que les prieres d’une perſonne ſi vertueuſe, ayent irrité contre luy le Dieu qu’on adore icy, vous ſouffrirez, s’il vous plaiſt, qu’il le conſulte : & qu’en voſtre preſence il sçache ſes intentions. La Princeſſe qui croyoit ne pouvoir rien attendre du Ciel qui ne luy fuſt avantageux, veû l’innocence de ſa vie, & la droiture de ſes ſentimens : luy dit qu’elle ſe reſjoüiſſoit de voir en luy cette marque de pieté ; & conſentit à ce qu’il voulut. Nous entraſmes donc dans le petit lieu deſtiné pour les Oracles : où cette Femme qui eſt fort belle, & veſtuë d’une façon aſſez magnifique, quoy que fort particuliere ; luy demanda de la meſme maniere que s’il euſt eſté le moindre de ſes Sujets, ce qu’il demandoit, & ce qu’il vouloit sçavoir ? Je veux (luy dit il, avec beaucoup de ſoumission) que vous ſuppliez le Dieu qui vous revele les ſecrets des hommes, de vouloir m’aprendre par voſtre bouche, ſi la Princeſſe Mandane, ſera eternellement inhumaine : & ſi je ne dois jamais trouver de fin aux maux que j’endure. A cets mots, cette Femme ouvrit une grande Grille d’or, qui eſt au chevet de ſon lit : & s’eſtant miſe à genoux ſur des quarreaux qui eſtoient devant elle, fut un aſſez long-temps la teſte avancée dans l’emboucheure d’une petite voûte obſcure, qui eſt au delà de cette Grille, & que l’on a pratiquée dans l’eſpaisseur de la muraille. En ſuitte dequoy, ſaisie & poſſedée de l’eſprit Divin