Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/426

Cette page n’a pas encore été corrigée

Lit de parade tout couvert d’or, & une Table de meſme metal, avec une grande Lampe d’or, qui eſt touſjours allumée : ce lieu là n’eſtant ouvert de nulle part que la porte : qui eſtant engagées dans un autré lieu, ne l’eſclaire point du tout. C’eſt en cét endroit que cette Femme dont j’ay parlé demeure tout le jour, & couche toutes les nuits ; à l’exemple d’une que l’on dit qui eſt à Thebes en Egypte ; & d’une autre encore qui eſt dans Patare Ville de Licie. C’eſt donc en ce lieu là que cette Preſtresse vit ſeparée de tout le reſte du monde. & rend ſes Oracles à ceux qui la viennent conſulter. Apres cela, Chriſante, je vous diray, que pouſſée par je ne sçay quelle devotion, ou par je ne sçay quelle curioſité, un jour que nous fuſmes au Temple de Jupiter Belus, c’eſt à dire au grand Temple qui eſt en bas, où tout le monde va d’ordinaire ; il prit envie à la Princeſſe de monter au haut de la derniere Tour, & d’aller viſiter cette Femme ſi celebre à Babilone, pour luy demander ſon aſſistance envers les Dieux ; ſans avoir pourtant deſſein de conſulter l’Oracle. Icy Chriſante, admirez le hazard des choſes ! Mazare qui ſe trouva au Temple, donna la main à la Princeſſe, pour luy aider à monter cét Eſcalier qui eſt aſſez difficile : mais luy & nous fuſmes bien eſtonnez, quand nous fuſmes arrivez tout au haut de cette derniere Tour, de trouver que le Roy d’Aſſirie ſans ſuite & ſans avoir perſonne aveque luy que le Capitaine de ſes Gardes, eſtoit allé pour conſulter cette Femme : car certainement ſi la Princeſſe euſt sçeu qu’il y euſt eſté, elle n’y fuſt pas allée ce jour là. Comme il ne faiſoit que d’entrer dans ce petit Temple, & qu’il n’avoit pas encore parlé à la Preſtresse, il creut que ce cas fortuit avoit quelque choſe d’avantageux