fut venu, l’on nous dit qu’il faloit partir : & ce ne fut pas ſans peine que je forçay la Princeſſe à prendre quelque choſe. Madame, luy dis-je tout bas, la valeur d’Artamene pourra peut-eſtre vous retirer des mains d’un Prince qu’il eſt accouſtumé de vaincre : mais il ne pourroit pas vous retirer du Tombeau ſi vous y eſtiez. Vous avez raiſon ma fille, me dit elle, mais le moyen de vivre, au miſerable eſtat où je fuis ? C’eſt aux grandes Ames, luy dis-je, à ſupporter les grandes infortunes conſtamment : Ha Marteſie, s’écria t’elle, que la conſtance eſt une vertu difficile ! Elle eſt meſme une vertu trompeuſe : qui pour l’ordinaire, ne met le calme que dans les yeux & ſur le viſage : ſans empeſcher que le cœur ne ſoit dechiré par de cruelles agitations. Enfin Seigneur, je dis tant de choſes, que je la contraignis de manger : & peu de momens apres, l’on nous contraignit à partir. Nous marchaſmes de cette ſorte trois nuits, & campaſmes deux jours, ſans que Mandane vouluſt plus ſouffrir que Philidaſpe luy parlaſt : mais à la fin de la troiſiesme nuit, comme nous ne faiſions que d’entrer dans le Pavillon ; & que ſelon ma couſtume, j’eus regardé ſi ſuivant l’intention de la Princeſſe, Philidaſpe ne s’en eſtoit pas aſſez retiré pour ne pouvoit pas meſme entendre ce qu’elle diſoit, nous entendiſmes un aſſez grand bruit : & au meſme inſtant, un Eſcuyer de Philidaſpe vint nous faire partir en diligence : laiſſant le Pavillon tendu, & ne nous donnant pas ſeulement un moment de loiſir. Comme nous ne voiyons point Philidaſpe, & que nous entendions un aſſez grand tumulte à trente ou quarante pas loing de nous, la Princeſſe s’imagina, que peut eſtre eſtoit-ce du ſecours qui nous
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