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rien qui choque la generoſité ; & qu’ainſi il luy tiendra exactement ſa parole. Mais pendant qu’Ortalque fut à Pterie & revint à Sinope, où il rendit compte de ſon voyage à ſon Maiſtre, & luy fit sçavoir la genereuſe reſponse du Roy d’Aſſirie : tous ces Rois & tous ces Princes ne ſongeoient qu’à obſerver les ſentimens de Ciaxare, afin de s’en ſervir avantageuſement pour Artamene : & tous les Soldats pouſſez par leur propre mouvement, & excitez encore par leurs Chefs ; ne faiſoient autre choſe que demander tout haut qu’on leur rendiſt Artamene ; ou qu’autrement ils n’iroient plus à la guerre.

Pendant, dis-je, que Ciaxare eſtoit toujours irreſolu ſur ce qu’il devoit faire, & qu’il ſembloit meſme pancher un peu vers l’indulgence ; Chriſante & Feraulas eſtoient dans une agitation, qui ne leur laiſſoit aucun repos. Car tantoſt ils alloient viſiter leur cher Maiſtre, tantoſt ils alloient viviter tous ces Princes, qui s’intereſſoient en ſa fortune ; tantoſt ils alloient chez le Roy ; & tres ſouvent chez Hidaſpe & chez Aduſius. De ſorte qu’agiſſant continuellement, & vivant entre l’eſperance & la crainte ; leur ame n’eſtoit guere tranquile. Ils eurent quelque deſſein d’envoyer en Perſe, afin d’advertir Cambiſe, & de la vie du Prince ſon Fils, & du peril où il eſtoit : mais la diſtance des lieux les en empeſcha : joint qu’Artamene en ayant eu la penſée, le leur deffendit expreſſément : ne voulant point, leur dit-il, que le Roy ſon Pere sçeuſt qu’il eſtoit vivant, qu’il ne fuſt en eſtat de le luy pouvoir aprendre ſans douleur. il leur repreſentoit de plus, que cela ſeroit abſolument inutile : puis qu’auſſi bien n’eſtoit il pas encore à propos, de faire sçavoir à Ciaxare qu’il eſtoit Cyrus. Un ſoir donc que Chriſante & Feraulas, eſtoient enſemble, à ſe