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trop fait : Si vous sçaviez, luy dit il, quel eſt le merite de la Princeſſe Mandane, vous Vous eſtonneriez moins de l’excés de ma joye. Car encore qu’elle doive eſtre voſtre Reine, adjouſta-t’il, comme vous ne l’avez jamais veüe, je puis vous aſſurer, que je m’interee plus pour elle, que la plus part des Sujets qu’elle doit un jour avoir en Medie. Il feroit à ſouhaiter, reſpondit Aglatidas, que le Roy sçeuſt le zele que vous avez pour tout ce qui le regarde ; & qu’il euſt pour vous, des ſentimens tels que je les ay. Cependant Andramias amena Ortalque, qu’Artamene embraſſa avec une tendreſſe eſtrange : luy ſemblant quaſi que plus il feroit de carreſſes à cet homme, plus il luy diroit de nouvelles de la Princeſſe Mandane. Il luy demanda neantmoint tant choſes à la fois, qu’Ortalque n’y pouvoit reſpondre : mais à la fin il luy aprit ce qu’il en sçavoit, & ce qui ne ſatisfit pas entierement Artamene. Neantmoins, la certitude de la vie de ſa Princeſſe, luy donna une ſi ſensible joye, que d’abord nulle autre conſideration ne pût troubler ny diminuer ſon plaiſir. C’eſt à vous, diſoit il à Aglatidas & à Andramias, à vous reſjouïr de la reſurrection de voſtre Princeſſe : de voſtre Princeſſe ; dis-je, qui effacera ſans doute la reputation de toutes celles qui ont eſté. Mais, luy dit Aglatidas en l’interrompant, Ortalque par le zele qu’il a pour vous, a eu une penſée qui me ſemble aſſez raiſonnable : car enfin il a demandé à vous voir, avec intention que ce ſoit de voſtre main que le Roy aprenne la vie de la Princeſſe ſa Fille : s’imaginant avec quelque aparence, que cette joye que vous donnerez à Ciaxare, diſposera en quelque ſorte ſon eſprit à eſcouter plus favorablement, ce qu’on luy dira en vôtre faveur.