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d’estre desja bien loing, quand on sçaura vostre fuitte. Comme ceux que je sçay qui vous observent, ne vous suivent que le jour, s’assurant la nuit sur les Gardes qui veillent dans le Camp & hors du Camp, la chose apparemment reüssira : & je vous feray prendre un chemin, où si je ne me trompe l’on ne vous cherchera pas. Enfin, luy dit Indathirse, je veux estre vostre Guide & vostre Escorte tout ensemble : Mais ne pensez pas, adjousta-t’il, que ce soit par interest que je vous rende cét office : car encore une fois, dit alors ce Prince affligé, je ne veux plus aimer Thomiris : & je veux que l’absence qui a accoustumé de guerir de semblables maladies, acheve de faire ce que le despit a desja commencé. En un mot Seigneur, pour accourcir mon discours autant que je le pourray, quoy qu’Artamene peust dire, afin de n’oster pas un si illustre Amant à Thomiris, il ne pût jamais en venir à bout : & il falut qu’il acceptast ce qu’Indathirse luy offroit. La chose s’executa avec plus de facilité que nous ne pensions : Indathirse demanda son congé & l’obtint : mon Maistre faignit de se trouver mal : nous sortismes la nuit de sa Tente, pour aller à celle d’Indathirse qui estoit fort proche : nous ordonnasmes à un de ceux qui restoient, & qui estoit un Soldat determiné, de cacher nostre fuitte aussi longtemps qu’il pourroit : & à le premiere pointe du jour, nous sortismes des Tentes Royales, sans que personne nous reconnust, parce que l’on ne voyoit encore guere clair : & que de plus, nous estions meslez parmy le train d’Indathirse. Les Gardes qui le soir avoient reçeu ordre de la Reine de laisser partir ce Prince, ne s’opposerent point à nostre sortie : de sorte que nous nous vismes hors du Camp, & au