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peut estre (adjousta-t’elle en rougissant) vous aimeriez mieux obeïr en ce lieu là, que commander en celuy-cy. Il est sans doute juste, repliqua Artamene un peu interdit, que je demeure dans les sentimens que vous dites : car Madame, je me suis imposé moy mesme la necessité d’obeïr en Capadoce, quoy que je ne sois pas nay Sujet de Ciaxare : & je ne pourrois jamais avoir nul droit de commander aux Massagettes : à moins, luy dit il en sous-riant, que le Roy mon Maistre m’envoyast leur faire la guerre, ce que vostre Majesté sçait bien qui n’a garde d’arriver. Vous sçavez, luy dit elle, que l’on gagne des Couronnes de plus d’une façon : il est des Rois electifs, comme des Rois Conquerans : ainsi qui vous a dit que sans combattre, vous ne pourriez pas regner icy, ou du moins sur les Issedones ? La raison, Madame, me l’a enseigné, repliqua Artamene, sçachant bien que la Couronne des Issedones n’est pas elective : & sçachant plus certainement encore, que tous vos Peuples sont si contens de vostre domination, qu’ils ne changeroient pas facilement de sentimens. Non, Madame, je ne suis pas si peu versé aux diverses coustumes des Peuples, que je ne sçache bien que celles de Sparte ne sont pas celles des Massagettes ; & que ce n’est pas icy où les Rois sont electifs. Mais c’est vous Madame (luy dit il, sans luy donner loisir de respondre) qui pouvez gagner plus d’une Couronne sans combattre : & vostre vertu vous a fait assez d’illustres adorateurs par toute la Terre, pour me pouvoir permettre de dire, que vous pourrez choisir des Sceptres & des Couronnes quand il vous plaira. Et quoy que celles que vous portez soient illustres, croyez Madame, adjousta-t’il, qu’il y en a encore