Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/218

Cette page n’a pas encore été corrigée

point de cause bien importante, au long sejour d’Artamene : & l’insensibilité de la Reine pour eux, leur persuadoit que du moins l’inclination qu’elle tesmoignoit avoir pour Artamene, n’estoit pas née sans qu’il y eust contribué quelque chose. Enfin, ils croyoient que mon Maistre aimoit Thomiris, & que Thomiris ne le haissoit pas : ils en parlerent ensemble, comme d’une chose qui les regardoit esgalement : & ils parurent estre en une amitié fort estroite. Souffrirons nous, disoit Aripithe, que cét Estranger vienne nous faire cét outrage ? & qu’aux yeux de tous les Massagettes, il obtienne en peu de jours, ce que nos soins & nos services n’ont pû obtenir pendant une année ? Je sçay bien, disoit Indathirse, qu’il est infiniment bien fait, & infiniment aimable : mais ce qui excuse peut-estre Thomiris, ne justifie pas Artamene ; qui ne devoit jamais sortir des termes de la condition d’un Ambassadeur. Cependant, Seigneur, lors qu’ils estoient convenus du crime de mon Maistre, ils ne convenoient pas de la punition qu’ils en vouloient faire : car ils estoient trop braves, pour songer à se vanger d’Artamene par une voye lasche. De se battre aussi contre un Ambassadeur, il sembloit que c’estoit chercher les moyens de se faire bannir par Thomiris : qui trouveroit sans doute fort mauvais, que l’on eust violé le droit des Gens, en la personne d’Artamene ; & qu’on l’eust exposée à une guerre Estrangere. Ainsi ils avoient bien de la peine à resoudre ce qu’ils feroient : ils n’estoient pas mesme d’accord en cas qu’il se falust battre contre Artamene, lequel des deux auroit cét employ, qui n’estoit pas moins difficile que glorieux. Indathirse disoit que c’estoit à luy ; Aripithe disoit y avoir autant de droit qu’Indathirse : &