Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/177

Cette page n’a pas encore été corrigée

tout le mal dont nous sommes menacez. A ces mots, Artamene ne doutant plus du tout que Ciaxare ne sçeust la verité de son avanture, estoit sur le point de l’assurer, qu’il luy respondoit de la fidelité de Cyrus : lors que la Princesse l’interrompant ; Seigneur, dit elle au Roy, il faut esperer en effet, que les Dieux qui sont tous bons, ne souffriront pas que toute l’Asie soit renversée ; & ils seront peut-estre si clemens, que sans qu’il en couste mesme la vie à Cyrus, ils vous laissent jouir en repos, de la felicité de vostre regne. Je le veux croire ma Fille, repliqua le Roy, car enfin tant que Cyrus ne paroistra point les armes à la main, il ne conquestera ny Provinces, ny Royaumes : & dés que nous le verrons à la teste d’une Armée ; Voicy (adjousta-t’il en embrassant mon Maistre) celuy que nous luy opposerons ; & qui nous empeschera sans doute, de suivre le Char de ce pretendu Vainqueur de toute l’Asie. La Princesse & Artamene demeurerent alors aussi surpris, d’entendre ce que le Roy disoit, qu’ils l’avoient esté de ce qu’il avoit dit, au commencement de son discours, mais plus agreablement. Mandane qui n’avoit osé lever les yeux jusques à ce moment là, regarda mon Maistre ; qui reprenant la parole, pour confirmer encore davantage le Roy en l’opinion où il estoit ; Ouy, Seigneur, dit il à Ciaxare, j’ose vous assurer que tant qu’Artamene sera Artamene, vous n’avez rien à craindre de Cyrus, quand mesme il seroit à la teste d’une Armée de cent mille hommes : mais je ne laisse pas de vous estre infiniment obligé, des sentimens avantageux que vostre Majesté tesmoigne avoir de moy. Je ne les sçaurois avoir trop grands, repliqua Ciaxare, & si les Dieux ne vous avoient envoyé à mon secours, je serois sans