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menacé en son particulier, d’avoir une longue guerre contre le Roy de Lydie. De sorte qu’il estoit aisé de voir, qu’il alloit infailliblement arriver une revolution universelle, aux Royaumes de Pont & de Bythinie, si l’on n’y remedioit promptement. Artamene trouvant une si belle matiere d’obliger le Roy de Pont ; de s’aquitter envers luy ; de faire une action heroïque ; & de le faire partir de Sinope, où il n’estoit pas trop aise de le voir ; supplia le Roy de vouloir non seulement le delivrer, mais mesme luy donner des Troupes, pour remettre ses Sujets en leur devoir. Il luy representa qu’il luy seroit beaucoup plus glorieux, & mesme plus avantageux d’en user ainsi, que de le retenir prisonnier : puis que s’il arrivoit qu’il perdist ses deux Royaumes, comme il y avoit bien de l’aparence qu’il les perdroit ; il ne seroit pas alors en estat de pouvoir payer sa rançon : de sorte que l’on seroit apres obligé de le garder toujours, ou de le delivrer cruellement, en un temps, où il n’auroit plus nulle esperance de remonter sur le Throsne. Il luy representa de plus, que ce Prince estoit genereux : & qu’en l’obligeant de bonne grace, l’on ne s’exposeroit à rien. Enfin comme Artamene estoit fort puissant sur l’esprit de Ciaxare ; & qu’en effet il sçait persuader tout ce qu’il veut quant il l’entreprend ; le Roy consentit à ce qu’il voulut : à condition toutefois que le Roy de Pont remettroit entre ses mains deux Places considerables de celles qui tenoient encore son Party : & qu’il promettroit solemnellement, de ne faire jamais la guerre contre la Capadoce. Artamene ayant obtenu ce qu’il desiroit, fut au mesme instant trouver le Roy de Pont, qui sçavoit desja son malheur : mais qui ne sçavoit pas le remede que l’on